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Procès et intercession dans les contes de Charles Nodier Odile Clause California Polytechnic State University Charles Nodier fut un des premiers écrivains français à exploiter les vastes possibilités du fantastique. "Je m'avisai un jour que la voie fantastique, prise au sérieux, serait tout à fait nouvelle ..." nous dit-il dans la deuxième préface à Smarra (38). Cette voie, nous la vivons régulièrement dans notre vie nocturne par l'intermédiaire du rêve ou du cauchemar, nous la vivons aussi dans nos angoisses ou dans nos illusions. C'est à partir de ces constatations que Nodier commence son exploration du côté sombre de l'inconscient. Plus il observe l'évolution du XIXème siècle vers le positivisme et le matérialisme, plus il s'accroche à une forme littéraire qui lui semble leur contrepartie. Car, pour lui, le fantastique est, avant tout, une littérature de l'irrationnel, de l'imagination et du coeur ou, comme le dit Roger Bozzetto "une catégorie a priori de la sensibilité qui impose son propre rapport au monde, et permet à celui-ci d'être perçu dans sa fraîcheur comme dans son horreur natives" (76). Cette interprétation du fantastique la fait échapper en partie aux définitions plus restrictives des critiques modernes. La définition donnée par Pierre-Georges Castex décrit bien une oeuvre telle que Smarra: [Le fantastique] se caractérise. . . par une intrusion brutale du mystère dans le cadre de la vie réelle; il est lié généralement aux états morbides de la conscience qui, dans les phénomènes de cauchemar ou de délire, projettedevant elle des images de ses angoisses ou de ses terreurs. (8) Elle ne convient plus à Trilby où les lutins vivent harmonieusement avec la population d'Argail. Trilby, en effet, appartient surtout au merveilleux car il nous projette dans un monde en dehors de la réalité quotidienne. Il en est de même pour beaucoup d'autres contes où l'introduction d'éléments merveilleux vient souvent interrompre le fantastique. Tandis que les images fantastiques donnent à Nodier la possibilité d'exprimer son aliénation, le merveilleux lui permet d'y remédier. Ce rôle est particulièrement visible dans un motifqui hante les contes les plus importants de Nodier: celui du jugement d'un être par les autres. Dans YHistoire d'Hélène Gillet Nodier reprend le récit d'un écrivain contemporain sur la condamnation injuste d'unejeune filledu XVIème siècle. Cette histoire vraie raconte la triste aventure d'Hélène, jeune fille noble violée pendant son sommeil et devenue mère. Le père 107 108Rocky Mountain Review dérobe l'enfant et disparaît. On retrouve le cadavre du nouveau-né un peu plus tard et on arrête Hélène. Condamnée à mort, elle accepte sa triste fin sans comprendre. Les faits mêmes de l'histoire sont mentionnés brièvement car les détails qui seraient normalement souhaitables pour entraîner la croyance de l'auditoire ne sont pas nécessaires ici: on croit puisque c'est vrai. Cela explique aussi pourquoi YHistoire d'Hélène Gillet est un des récits préférés de Nodier. C'est le seul qui remplisse les conditions de "l'histoire fantastique vraie, qui est la première de toutes, parce qu'elle ébranle profondément le coeur sans coûter de sacrifices à la raison" (330). Par contre, Nodier insiste sur certains détails subjectifs: la beauté d'Hélène et son innocence qu'il contraste avec les circonstances sordides de la séduction. D'abord salie par cet homme mystérieux, Hélène devient la risée des commères. De son innocence, il ne lui reste plus que la conviction intérieure car, déjà, elle est coupable aux yeux de tous. Elle porte le poids d'un péché grave dont elle ne possède comme indication que le blâme de la société qui la rejette. Les autres savent avant elle ce qui lui arrive tandis qu'elle-même croit...

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