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  • Les Études sur les femmes écrivains du XVIe siècle français
  • Jean-Philippe Beaulieu and Diane Desrosiers-Bonin

L'un des grands enjeux des études littéraires sur le seizième siècle français aura été, à partir des années 1980, l'intérêt tout à fait nouveau porté aux écrits des femmes de la Renaissance et leur inclusion dans une histoire littéraire dont elles n'occupaient jusque-là que les marges. Un tel intérêt pour la période au cours de laquelle les femmes ont eu un accès de plus en plus grand à la sphère et à la parole publiques s'est récemment traduit par de nombreux travaux portant sur les représentations littéraires ou iconographiques de la femme, sur l'histoire sociale et la condition féminine,1 sur les discours argumentatifs quant à la valeur du sexe féminin2 et, surtout, sur la place des femmes écrivains à la Renaissance.3 Nous voulons ici insister sur ce dernier aspect, de manière à esquisser un rapide survol de l'orientation des travaux récents qui confirment que, désormais, l'étude des femmes écrivains du passé ne nécessite plus guère de justification. Certes, sur ce plan, le monde anglo-saxon a, comme on le sait, une bonne longueur d'avance; les premiers colloques sur les femmes d'Ancien Régime ont d'ailleurs eu lieu en Amérique du Nord, souvent organisés par des [End Page 370] seiziémistes.4 La création de la SIEFAR (Société internationale pour l'étude des femmes de l'Ancien Régime) en 2000 a cependant donné une vigoureuse impulsion au domaine en France et en Europe continentale.5 Pour s'en convaincre, on n'aura qu'à consulter le site internet de la société (<www.siefar.org>), qui témoigne de la vitalité des activités scientifiques de ce domaine en plein développement.

Dans l'ensemble des études sur les femmes d'Ancien Régime, la Renaissance occupe, semble-t-il, un statut privilégié, probablement parce qu'il s'agit d'une époque fondatrice pour l'écriture au féminin. Si, comme le montrent les travaux récemment réalisés sur les femmes du Moyen Âge, la place que celles-ci ont occupée dans le monde de la culture et des lettres est loin d'être négligeable, force est de constater que, du moins en ce qui concerne la littérature de langue française, la Renaissance a connu un développement exponentiel du nombre de femmes ayant cherché à accéder au statut d'auteur. Il n'est donc pas surprenant que cette période ait suscité, depuis quelques décennies, une quantité de réflexions envisageant les textes de femmes sous l'angle d'une problématique liée à la généricité (au sens de gender), c'est-à-dire aux aspects des textes qui sont tributaires de l'appartenance de leur auteur au sexe féminin. Si les travaux récents ne prennent pas nécessairement en compte la question de la généricité, en abordant le corpus de manière neutre (c'est-à-dire comme on le ferait pour des auteurs masculins), il n'en reste pas moins que cette question (et la recherche de paramè tres d'évaluation différents qui l'accompagne), en attirant notre attention sur des corpus méconnus, se trouve indéniablement à l'origine de l'intérêt récent pour les écrits de femmes.

Un tel élargissement repose en grande partie sur un travail d'identification des figures auctoriales féminines et des textes qui leur sont attribués. Diverses entreprises de nature bibliographique, menées surtout en Amérique du Nord, ont permis de préciser l'ampleur du corpus textuel en cause. Une équipe de l'Université d'Ottawa, sous la direction de Pierre-Louis Vaillancourt, a procédé à [End Page 371] un premier inventaire des imprimés féminins non fictionnels.6 Pour sa part, William Kemp, spécialiste de l'histoire matérielle du livre, a établi un répertoire des textes écrits par des femmes (ou attribués...

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