In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • Négocier l'emploi. 50 ans de négociations interprofessionnelles sur l'emploi et la formation
  • Vincent Viet
Jacques Freyssinet . - Négocier l'emploi. 50 ans de négociations inter-professionnelles sur l'emploi et la formation, Paris, Éditions Liaisons, 2010, 312 pages. « Liaisons sociales ».

Spécialiste du chômage et des politiques de l'emploi, Jacques Freyssinet nous convie, dans son nouvel ouvrage, à décrypter, sur un demi-siècle (1958-2008), la dynamique des négociations interprofessionnelles sur l'emploi. Dans la mesure où les « préoccupations dominantes », dont ces négociations sont le reflet, ne se sont pas succédé mais se sont sédimentées au fil du temps, l'exercice requérait à la fois une périodisation et une grille d'interrogations à géométrie variable. Ou, pour être plus précis, une focale sur des « moments » clefs de la négociation, qui permette à chaque fois de caractériser la configuration, le jeu et la stratégie temporaires des acteurs impliqués (État, syndicats et patronat), et une focale socio-historique, qui questionne, dans la durée, l'évolution structurelle des négociations ainsi que les facteurs susceptibles de les avoir influencées.

La périodisation retenue distingue plusieurs phases : la première (1958-milieu des années 1970) se caractérise par la création négociée d'instruments visant à amortir les effets des restructurations industrielles sur l'emploi ; la seconde qui en prend le relais jusqu'au début des années 1980, dans un contexte de récession supposé réversible, est marquée par l'accompagnement du coût social d'un chômage de masse, réputé pour un temps conjoncturel ; la désillusion qui s'ensuivra, au tournant des années 1980, déplacera l'enjeu - désormais conflictuel - de la négociation vers l'identification des variables pertinentes du chômage et, partant, vers les mesures susceptibles de les influencer positivement. Après l'échec, en 1984, d'un projet d'accord multidimensionnel sur la flexibilité, les négociations se fractionnent par domaine jusqu'à l'accord du 11 janvier 2008 qui confère aux « partenaires sociaux » une « sphère de responsabilité autonome dans la régulation de l'emploi » (sic). Quant à la grille d'interrogations retenue, elle embrasse les « facteurs d'émergence de la négociation sur l'emploi », la place de celle-ci dans le système global de régulation de l'emploi et, enfin, l'impact de l'environnement international sur les négociations interprofessionnelles.

En mobilisant et croisant ces deux outils d'analyse, Jacques Freyssinet évite à coup sûr l'écueil d'une approche strictement chronologique qui ne permettrait pas de rendre compte de la sédimentation des problèmes et de la complexité croissante des négociations. Mais il s'oblige, en contrepartie, à remonter fréquemment dans le temps - au risque de se répéter -, sans pouvoir dégager les ruptures ou les inflexions les plus significatives qui vaudraient - mais est-ce possible ? - pour l'ensemble des [End Page 128] questions abordées. Il en découle un subtil mélange de résultats tantôt conjoncturels, tantôt valables pour toute la période étudiée. Si l'intérêt de ces résultats est manifeste, les historiens éprouveront sans doute un certain scepticisme à la lecture du premier chapitre qui part ex abrupto d'une définition restrictive de la négociation collective, détachée de toute référence au passé. En limitant le champ de l'ouvrage « aux seuls accords collectifs qui font référence à l'emploi comme objectif de la négociation et source de légitimation de leur contenu », l'auteur se prive, en effet, de la possibilité d'identifier les autres formes passées d'une telle négociation (qui a bel et bien eu lieu dans le cadre du « protectionnisme ouvrier » dont la politique de maind'oeuvre s'est notamment réclamée dans les années 1930), invente la problématique quelque peu artificielle du pourquoi de « l'apparition « tardive » des négociations sur l'emploi », et se laisse abuser par ce qu'il appelle la « rupture historique...

pdf

Share