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Re-présentant les Lettres d'une Péruvienne en 1752: illustration et illusion Jonathan Mallinson Françoise de Graffigny republia les Lettres d'unePéruvienne, roman à succès qui en cinq ans avait connu au moins 14 éditions en français,1 et avait suscité au moins quatre comptes rendus,2 deux suites,3 et deux traductions.4 Cette nouvelle édition différait à maints égards de l'édition originale. Graffigny fit précéder son texte d'une Introduction historique, qui, inspirée par le Commentaire royal de Garcilaso de la Vega,5 donnait au roman un certain prestige scienti1 Voir D. Smith, «The Popularity of Madame de Graffigny's ¡Mies d'une Péruvienne: the Bibliographical Evidence» Eiglileenth-Cerituiy Fiction 3 (1990), 1-20. 2 Pierre Clément, Ij:s CinqAnnées lilléiaiies [1748]; Elie Catherine Fréron, ¡Mies sur quelques écrits decetemps (1749); abbéJoseph de La Porte, Observations sur la littetature moderne (1749); abbé Guillaume-Thomas Raynal, Nouvelles littéraires mariusciiles [c.1749]. Voir lettres d'une Pénivienne, éd.J. Mallinson (Oxford: Voltaire Foundation, 2002), pp. 251-77. Les références renvoient à cette édition. 3 Suite des lettres d'une Péruvienne [1748] que Graffigny et Devaux attribuent au chevalier de Mouhy (voir V.L. Grayson, The Genesis and Reception of Mme de Giaffigny's "Ijellres d'une Péruvienne" and "Cériie," Studies on Voltaire and the Eighteenth Ceiiliiiy 336 (1996), 1-152 (p. 29); Ignace Hugaryde Lamarche-Courmont, lollies d'Aza, ou d'un Péruvien. Conclusion des¡stltes Péruviennes [1748]. 4 ¡¿liéis Written by a Perumari Princess (London: J. Briudley, 1748); Biiefe einei Peruanerin (Breslau, 1750). 5 Le texte espagnol, Comen¡arios nalesdelos incas, avait été traduit en français dès le début du XVIl* siècle: I¿Commentane royal, ou l'Ilistoitedes Yncas, roys du Pérou,fidellemenl ¡induitesur laxieision Espagnole, par I. Baudoin (Paris: Courbé, 1633). Cette traduction fut republiée au moins cinq fois dans la première moitié du ????G siècle. En 1644 parut une nouvelle traduction, par Thomas-François Dalibard: 1listoitedes Incas, Rois du Peiou, Nouvellement liaduitede l'Espagnolde EIGHTEENTH-CENTURY FICTION, Volume 15, Number 2,January 2003 228 EIGHTEENTH-CENTURY FICTION fique et historique; et elle y ajouta deux nouvelles lettres, dont l'une critiquait le goût des Français pour le luxe, et l'autre dénonçait la manière dont on négligeait l'éducation donnée aux filles. L'édition portait le nom de l'auteur dans le privilège du Roi; elle fut publiée par Duchesne, éditeur beaucoup plus coté que la veuve Pissot, responsable de l'édition originale; et elle était divisée en deux volumes, chacun orné d'une page de titre richement décorée, et d'une estampe en regard, dessinée par Charles Eisen (1720-1778) et gravée parJean-Baptiste Delafosse (?21-1775). Si l'idée de republier un texte épistolaire avec de nouvelles lettres n'était pas particulièrement remarquable,0 l'idée de (re)publier un roman dans une édition illustrée était beaucoup moins commune,7 et celle de le faire cinq ans seulement après la première édition, était sans précédent. L'édition illustrée de Manon Lescautne sortirait qu'en 1753, 22 ans après l'édition originale; et la nouvelle édition des Lettres persanes de 1754 ne serait pas illustrée. Faire une démarche tellement exceptionnelle était reconnaître la popularité non moins exceptionnelle du roman, et vouloir en tirer profit; c'était rendre le texte encore plus prestigieux, et faire de l'édition un objet de luxe.8 Le choix de l'illustrateur a sans doute aussi servi à rehausser le prestige du texte. Charles-Dominique-Joseph Eisen, né en 1720, était au début d'une carrière brillante. Au cours des années 40, il avait rempli plusieurs commissions prestigieuses:9 en 1745, les Fêtes Garcillasso dela Vega, e¡ misedons un meilleuroïdie/.../ (Paris: Prault fils, 1744). Il a été établi que Graffigny connaissait les deux versions du texte (voir Grayson, pp. 8-10). 6 Voir, par exemple, d'Argens...

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