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134 EIGHTEENTH-CENTURY FICTION16:1 en l'occurrence). Les traductions ont alors pour rôle de promouvoir la langue nationale, d'en élargir la gamme et l'usage, de la «forcer», en quelque sorte, à se mesurer aux modes d'expression littéraire qu'elle n'a encorejamais pratiqués. Dans ces littératures, des genres entiers n'existent que par des traductions avant de produire des textes originaux. C'est, selon O. Penke, le cas du roman hongrois, dont la première œuvre originale ne date que de 1788. O. Penke étudie l'évolution des théories hongroises de la traduction dans ce contexte et M. Bjôrkman s'attarde sur la carrière d'une seule traductrice, Cathrina Ahlgren, dont on peut cependant se demander si elle est vraiment exemplaire. Et qu'en est-il de «La Dernière Chemise de l'amour»? On apprend par une note que l'énigmatique sous-titre du recueil fait allusion à une traduction fautive de «Love's Last Shift», attribuée à P.-A. de La Place, mais que veut-on exactement par là nous faire penser de la traduction au xvme siècle? Shelly Charles Université Paris-Sorbonne Madeleine Dobie. Foreign Bodies: Gender, Language and Culture in French Orientalism. Stanford, CA: Stanford University Press, 2001. xiv + 234pp. US$49.50. ISBN 0-8047-4104-2. Issu de la réécriture d'une thèse, cet ouvrage se réclame de la pensée de Michel Foucault et surtout des vues d'Edward Said, largement diffusées dans le monde anglo-saxon, sur l'orientalisme comme discours d'escorte des idéologies coloniales occidentales. Il porte sur les représentations sexuées— terme peu exact, mais le mot gender est malaisé à traduire—des contacts de races et de cultures dans la littérature française aux XVIIIe et XIXe siècles, plus particulièrement sur les fonctions qu'y remplit l'image de la «femme orientale » en relation avec l'histoire coloniale à l'intérieur d'un corpus de textes chronologiquement répartis entre les Lettrespersanes (1721) et Le roman de la momie de Gautier (1857). Trois des cinq chapitres concernent le siècle des Lumières, sans s'attacher spécifiquement au genre romanesque, mais avec une prédilection pour les œuvres de fiction. Ce livre très tributaire des courants critiques en vogue outre-atlantique—«gender studies», «cultural studies», «colonial and post-colonial studies»— paraîtra vraisemblablement quelque peu «exotique» au lecteur français accoutumé aux prudences terre-à-terre des approches erudites classiques, ou simplement soucieux d'une définition précise de son objet d'étude et attentif REVIEWS135 à ne pas s'aventurer hors de son champ de compétence. C'est précisément en cela que ce travail est stimulant, tout en laissant parfois perplexe. L'introduction, de tonalité à la fois théorique et polémique, expose les soubassements de la recherche: montrer que l'Occident n'a pas seulement«féminisé l'Orient», mais aussi «orientalise le féminin» (p. 2), l'altérité incarnée par l'image de l'Orientale offrant un déplacement des formes d'altérité attribuées au féminin par la culture occidentale; et ce faisant lutter contre les formes ethnocentristes de négation de la spécificité culturelle de l'autre au sein de notre propre culture, déni qui serait à l'origine du ressentiment anti-occidental dans le fondamentalisme islamique d'aujourd'hui. L'orientalisme étant posé comme la sublimation et le déplacement, au sens psychanalytique du terme, de la réalité des pratiques coloniales dans la société française, l'auteur se propose d'une part de mettre en parallèle les représentations esthétiques du monde oriental avec les mutations de l'histoire coloniale. Posée comme une «nature» inaccessible, inconnaissable, peut-être vide de sentiment et de pensée, la femme orientale telle que la voient les écrivains, retirée derrière ses voiles dans l'espace clos du harem, figure d'autre part toutes les formes les plus radicales de l'altérité culturelle, mais aussi l'opacité irréductible du langage. L'orientalisme oscille ainsi entre l'occasion manquee par l...

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