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410 EIGHTEENTH-CENTURY FICTION 7:4 directrices: «Oubliés, les héros de papier, les aventures invraisemblables. Le monde bourgeois fournit au roman à la fois ses personnages, des héros vrais [...] et les obstacles qu'ils affrontent» (p. 18). Les histoires de Challe restent certes héritières d'une tendance héroïque et de la morale courtoise—«la quête de l'absolu ))—tout en inaugurant l'univers du xviif2 siècle où prédominent le réalisme et la prose des circonstances bourgeoises.«L'élan vers l'absolu est détourné vers la possession, c'est la dégradation bourgeoise» (p. 23). Il dépasse ensuite l'opposition entre ces «deux pôles de héros challien» pour en arriver à la valeur originale et dominante du roman: «la recherche du bonheur» (p. 24). Sans que ce soit un reproche, étant donné l'objectif de vulgarisation universitaire visé, on peut regretter que, malgré la présence, dans la bibliographie, de la critique challienne des années 80 jusqu'à 1991, les analyses tout au long de l'étude ne la prennent pas en compte. Dialoguer avec les études précédentes eût en effet évité un certain nombre de simplifications et d'erreurs, dont voici quelques exemples. Que Challe soit l'auteur de la Continuation du Don Quichotte (mis en doute, p. 7) ne fait plus aucun doute depuis longtemps: correspondances et registre des privilèges en donnent des preuves indiscutables; de même, le roman de Challe a inspiré trois et non deux pièces de théâtre (p. 6)—La Veuve de Collé est passée sous silence. La qualité de «héros bourgeois)) et l'étiquette de «réaliste», abondamment attribuées ici aux personnages et à l'univers challiens, ont été mises en doute par d'autres critiques. Tous les héros (sauf un, qui va le devenir) sont nobles et tiennent à leur mode de vie d'aristocrates, qui fait l'unité des valeurs du roman. Les termes de «réalisme» et de «bourgeois» sont à problématiser pour de multiples raisons: leur flou sémantique, surtout en 1713, et leur inadaptation à l'esthétique littéraire des Illustres Françaises. Voir dans le renouvellement du genre romanesque chez Challe «l'expression naïve et spontanée d'un tempérament» (p. 14) paraît une affirmation risquée que beaucoup de challiens contesteront. Divers travaux sur le genre romanesque ont prouvé que les romans grecs offrent les archétypes de toutes les composantes majeures de Gamour-passion. Challe se situe bien dans la longue histoire d'un genre, loin de la «spontanéité». Enfin, de multiples généralisations concernant «le héros challien» rendent mal compte de l'extrême diversité des valeurs héroïques incamées en sept héros et huit héroïnes, radicalement différents. L'étude est constamment bien écrite, enrichie de citations d'auteurs du xxe siècle mêlées à celles du roman de Challe, ce qui en révèle à juste titre la modernité. La progression se fait fermement, même si l'on peut regretter que la Ie partie fasse 140 pages, la 2e 60, et la dernière 45. Une argumentation claire et abondante, un style vivant et prenant se révèlent capables de toucher et convaincre le lecteur. Raymond Delley écrit et parle avec passion, avec raison, d'un roman qui le mérite. Michèle Weil Université de Montpellier Robert Challe. Continuation de l'Histoire de l'admirable Don Quichotte de la Manche. Édition critique par Jacques Cormier et Michèle Weil. Genève: Droz, 1994. 503pp. ISBN 2-600-00006-2. L'attribution de la Continuation de l'Histoire de l'admirable Don Quichotte de la Manche à Robert Challe était dans l'air depuis quelque temps; Frédéric Deloffre, le grand COMPTES RENDUS 411 découvreur de Challe, y avait fait allusion à plusieurs reprises. Il ne manquait que la preuve irréfutable, de même d'ailleurs que l'objet en question: cette Continuation dont on parlait, mais dont le texte, jamais plus repris depuis la moitié du siècle dernier, était pratiquement inconnu. Tout cela est maintenant...

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