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  • Erotika biblion
  • Edward Ousselin
Mirabeau: Erotika biblion. Édition critique avec introduction, notes et variantes par Jean-Pierre Dubost. (Libre pensée et littérature clandestine, 36). Paris: Honoré Champion, 2009. 186 pp. Hb €40.00.

Incarcéré au château de Vincennes de 1777 à 1780, Mirabeau y rédige, entre autres (à noter que Des lettres de cachet et des prisons d'État ainsi que les Lettres à Sophie résultent aussi de cette période d'emprisonnement), deux textes érotiques: Ma conversion ou Le libertin de [End Page 484] qualité et Erotika biblion. Comme le reste de l'œuvre libertine de Mirabeau, ces deux textes, longtemps confinés à 'l'Enfer' de la Bibliothèque nationale, ont néanmoins parfois été accessibles aux lecteurs, notamment à travers l'édition établie par Guillaume Apollinaire en 1910. Plus récemment, les Éditions Fayard ont publié les Œuvres érotiques de Mirabeau (voir la notice bibliographique de Dubost, pp. 167-71). La nouvelle édition critique d'Erotika biblion établie par Jean-Pierre Dubost confirme l'importance de ce texte, dans lequel Mirabeau a déployé plus d'érudition que d'érotisme. Ce livre tend également à renforcer l'analyse de Robert Darnton (The Forbidden Best-Sellers of Pre-Revolutionary France (New York: Norton, 1995)) sur l'influence politique des écrits pornographiques — incorporant souvent des considérations d'une autre teneur littéraire et devenant ainsi communément assimilés aux 'livres philosophiques' — dans la France du dix-huitième siècle. En ce qui concerne le cas de Mirabeau (comme le signale Darnton, p. 21), il s'agit d'un auteur de plusieurs livres pornographiques qui a également joué un rôle politique important durant les premières années de la Révolution. Dans son introduction, Dubost fait ressortir les liens entre les écrits politiques et libertins de l'auteur: 'pour Mirabeau, la motivation politique ou communautaire reste toujours insé parable d'un projet anthropologique fondé sur le sensualisme' (p. 15). Curieux ouvrage pourtant que ce catalogue d'anecdotes historiques et littéraires, au ton faussement détaché qui a pour effet d'en accentuer l'effet provocateur. Divisé en onze chapitres, dont les titres proviennent (avec un degré variable de précision) du grec ou de l'hébreu, Erotika biblion, que l'on pourrait traduire par 'de l'érotisme dans les livres' (voir Dubost, p. 8), se présente comme un inventaire pseudo-scientifique de pratiques ou de 'perversions' liées à la sexualité: la circoncision, l'androgynie, la masturbation, la sodomie, et ainsi de suite. Dans ce 'texte éclectique et hétéroclite' (Dubost, p. 11), Mirabeau pille et détourne allégrement les œuvres de nombreux auteurs, avec une prédilection particulière pour l'Encyclopédie et pour les travaux de Buffon. En récapitulant sur le mode burlesque des versets de la Bible truffés de bizarreries sexuelles ou scatologiques, Mirabeau est d'ailleurs plus proche de l'esprit satirique de Voltaire que de la furie érotique de Sade (ce dernier fut également incarcéré par deux fois à Vincennes, y compris lorsque Mirabeau s'y trouvait). À titre d'exemple, Mirabeau fait preuve de facétie et d'inventivité dans son commentaire du texte biblique lorsqu'il décrit la circoncision en masse des Hébreux, décrétée par Josué après leur sortie d'Égypte et leur longue période d'errance à travers le désert: 'Il y avait quarante ans qu'on n'avait coupé de prépuces; on en eut deux tonnes tout d'un coup' (p. 74). Dubost qualifie ce dernier détail d'ajout 'authentiquement carnavalesque' (note 68). L'appareil critique de Dubost est par ailleurs particulièrement fourni, représentant près de la moitié de la pagination de cette édition.

Edward Ousselin
Western Washington University
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