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Reviewed by:
  • L’Écrivain imaginaire. Scénographies auctoriales à l’époque romantique
  • Anthony Glinoer
Diaz, José-Luis. L’Écrivain imaginaire. Scénographies auctoriales à l’époque romantique. Paris, Honoré Champion, coll. « Romantisme et modernités », 2007, Pp. 700. ISBN 9782745315908

Énoncé dès l’ouverture de L’Écrivain imaginaire. Scénographies auctoriales à l’époque romantique, le fondement de la réflexion de José-Luis Diaz tient peut-être dans la distinction, qu’esquissait Michel Foucault mais qui est ici largement exploitée, entre trois niveaux d’analyse : le niveau “réel” d’abord, où est interrogé le sujet biographique et l’acteur social ; le niveau “textuel” ensuite, qui fait de l’auteur tant le signataire responsable de l’œuvre que le “régisseur formel” (p. 18) du texte ; le niveau “imaginaire” enfin qui regroupe l’imagerie, les fantasmes, les représentation, les imaginaires de l’écrivain tels qu’ils transparaissent principalement dans le discours auctorial lui-même et dans le discours critique. Ces trois strates, soutient cependant Diaz, sont toujours superposées et enchevêtrées à quelque degré. Il ne saurait donc être question de discriminer aisément entre ce qui relève de l’une ou de l’autre, et c’est là l’une des plus grandes forces et peut-être la plus grande faiblesse de ce livre : parce qu’il se montre attentif à faire advenir ce que les critiques ont ignoré ou déproblématisé, à savoir les opérations médiatiques de (re)présentation de soi que tout texte littéraire mobilise, parce qu’il parvient avec érudition et finesse à isoler les imaginaires de l’écrivain, Diaz perd parfois de vue les deux autres plans d’analyse. Sans doute était-ce, insistons-y, un mal nécessaire tant la tâche était immense, mais le problème n’en demeure pas moins que, sauf exceptions sur lesquelles nous reviendrons, L’écrivain imaginaire, son auteur ne s’en défend d’ailleurs pas, tient peu compte et des structures textuelles, pourtant éloquentes, et de la configuration particulière du champ littéraire autour de 1830. Il en résulte que les scénarios adoptés par les écrivains semblent dans cet univers de discours relever directement de leur choix conscient sans que pèse de tout leur poids les déterminations de l’espace littéraire.

La première partie du livre intitulée “La comédie littéraire à l’époque romantique”, détaille les transformations et les adaptations que subissent les “scénographies” (autrement dit ces jeux scéniques de l’écrivain imaginaire), tant au cours de la carrière de l’écrivain que dans l’histoire de la littérature française. Dans “Des scénarios pour être écrivain” sont abordés en premier lieu les rôles que le champ littéraire fait jouer aux écrivains imaginaires : sans qu’il soit à proprement parler question des cénacles romantiques, la “pyramide des emplois” (p. 50) qu’ils ont formée est décrite, depuis le grand Sachem jusqu’à la piétaille des thuriféraires, de même que les types de prophétie ou de textes manifestaires que les cénacles ont produits, les modèles qu’ils se sont inventés et les luttes intestines dont ils ont souffert. Puis, en coupe diachronique cette fois, l’auteur traverse les époques littéraires pour observer les ruptures successives qu’a connues l’écrivain imaginaire : émergence de l’auctoritas de l’écrivain au Moyen-Âge, rupture entre le poète lauréat de la Renaissance et le poète crotté de l’âge classique, rupture entre le bel esprit et le philosophe puis entre l’honnête homme et l’homme de lettres citoyen au xviiie siècle, rupture entre le philosophe et le poète, puis enfin rupture entre le poète prophète et le poète désenchanté sous l’Empire. Revenant alors à La Restauration et à la monarchie de Juillet, le chapitre “Entrer en littérature” prend les choses du point de vue de l’écrivain. Les étapes de la carrière et les aménagements [End Page 162] à faire au scénario choisi, voire la substitution d’un scénario à un autre...

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