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  • Roman 2008
  • Pierre Karch (bio)

Dans son plus récent ouvrage, L'espèce fabulatrice, Nancy Huston distingue la fiction littéraire des autres fictions (religieuses, familiales et politiques) qui composent notre monde, en soulignant qu'elle « ne nous dit pas où est le bien, où le mal. Sa mission éthique est autre : nous montrer la vérité des humains, une vérité toujours mixte et impure, tissée de paradoxes, de questionnements et d'abîmes ». Si certains romans publiés en 2008 lèvent le voile sur cette vérité, c'est loin d'être le cas pour tous.

Boréal

Depuis cinquante ans, Marie-Claire Blais, dont les photos ne vieillissent pas, étonne ses lecteurs toujours prêts à applaudir la lauréate des principaux prix littéraires de la France et du Canada. Naissance de Rebecca est une phrase de trois cents pages qui ne trouve son point qu'à la fin de ce roman qu'on a du mal à abandonner. . . au milieu d'une phrase. C'est un procédé qui rappelle les belles heures du « nouveau roman », je pense entre autres à celui de Claude Mauriac, Le dîner en ville (1959), véritable réussite dans le genre. Récit envoûtant. Invitation à la fête de Noël, métaphore de toutes les naissances physiques ou morales qui se font dans la douleur et dans la joie.

« Je l'avais découvert un samedi matin en m'approchant de la porte du jardin. [. . .] Il devait avoir cinq ou six ans. [. . .] Je comprenais qu'il était à laisser ou à prendre. » C'est ainsi que démarre le dernier roman de Ying [End Page 1] Chen, Un enfant à ma porte. Il y est question d'adoption, de maternité : « [. . .] tout le monde autour de moi [. . .] semblait vouloir m'apprendre qu'il n'y a pas de femme sans qualités maternelles ». Mais quelques pages plus loin, on définit la maternité, « une maladie sans remède ». Les relations se détériorent : « J'étais l'unique cible de l'attention de l'enfant ». Lucide, la mère s'analyse : « Aujourd'hui, je souffre que notre histoire ait mal tourné ». Vient la séparation suivie des remords, des regrets ne pas avoir été à la hauteur. Oublier ? Impossible : « Si la décision d'avoir cet enfant avait été pour moi une sorte de suicide, l'abandonner maintenant serait me tuer une seconde fois, tuer la mère que j'étais devenue malgré tout ».

Auteure de La Love (1993) qui lui a valu le Grand Prix du Journal de Montréal et le Prix des Arcades de Bologne, Louise Desjardins, dans Le fils du Che, réunit et sépare Angèle et Miguel, enfants de la révolution cubaine, qui ont eu un fils, Alex, qui a quatorze ans, au moment où commence le récit et dont l'évolution psychologique peut se résumer ainsi : au début, il joue au Pacman ; à la fin, il se consacre à Game Boy. Comme la romancière est branchée, ses personnages le sont aussi, que ce soit la mère alcoolique, « une vieille folle », qui fume des joints ou l'enfant qui envoie des courriels à sa petite amie Lola et qui fait tout pour désespérer sa mère. Mais, selon moi, il faut plus que les scènes que se font les personnages pour donner un semblant d'existence à ces êtres de papier, sans profondeur comme des personnages de contes.

Presque 39 ans, bientôt 100 est le premier roman de Fred Dompierre. Le lecteur suit le narrateur d'une page à l'autre de son journal. Pas littéraire, le journal. Il y est surtout question de bars, de filles, de prostitution, d'alcool. Cela donne un roman pour adolescents qui rêvent de se déniaiser. On ne peut pas dire que c'est très fort comme entrée dans le monde des lettres, mais c'est de toute évidence publiable, même chez Boréal qui a connu de meilleures années.

Plus loin, de David Dorais et Marie-Ève Mathieu, est un road novel, plus ou moins autobiographique, qui ne va nulle part, au cours duquel personne...

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