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  • Sciences des nombres et spiritualité entre Danube et Meuse (IX e–XII esiècle)
  • Michel Huglo
Sciences des nombres et spiritualité entre Danube et Meuse (IX e–XII esiècle). Par Thierry Lesieur. (Savoirs médiévaux, I). Paris: Éditions Classiques Garnier, 2009. 327pp., 18 ill. €68.50.

La relation entre le quadrivium ou science des nombres avec la spiritualité a été établie à l’abbaye Saint-Emmeram de Ratisbonne par Otloh et son disciple Guillaume – promu abbé d’Hirsau en 1069 – au cours d’une discussion. En relisant leurs travaux scientifiques et ceux de leurs contemporains, Thierry Lesieur a recherché quel était le lien qui rattachait ces deux pôles de la vie monastique: la prière et le travail intellectuel. Ce lien, selon Otloh, est le nombre considéré non pas dans sa réalité ‘charnelle’ ou matérielle, mais dans sa valeur spirituelle. Ainsi, dans le prologue acrostiche du Livre des miracles de saint Emmeram, Arnold de Saint-Emmeram, agence les nombres six et dix de manière à faire passer le lecteur du visible à l’invisible, du nombre triangulaire au symbole de la Trinité. Dans le dialogue au sujet De la mémoire du bienheureux Emmeram et de ses serviteurs, la réforme institutionnelle de Wolfgang implique un passage de l’unité à la dualité, puisque désormais la fonction d’évêque de Ratisbonne sera distincte de la fonction d’abbé, attribuée à Ramwold. En dissociant la fonction d’abbé de la dignité épiscopale, Wolfgang édifie le triumvirat Wolfgang-Emmeram-Ramwold (p. 68) à l’image de la Trinité. L’analyse des chefs-d’oeuvre artistiques produits par le scriptorium de Saint-Emmeram révèle dans les formes géométriques de la décoration dualité, trinité et quaternarité: ainsi dans les évangiles d’Uta, abbesse de Niedermünster, comme dans le Codex aureusde 870, auquel fut ajouté un feuillet pour Ramwold, abbé de Saint-Emmeram, entouré des quatre vertus cardinales. Outre la préparation matérielle des cadres de l’enluminure, basée sur les théorèmes de la géométrie euclidienne, l’évolution observée entre ces deux chefs-d’oeuvre devient évidente à la suite de la constatation du progrès accompli dans l’étude des ‘sciences des nombres’ par les moines de Saint-Emmeram: Hartvic avait rapporté de Chartres durant l’épiscopat de Fulbert une documentation sur les arts libéraux contenue dans un manuscrit écrit en grande partie de sa main (Munich, Clm 14272). C’est de cette époque que datent l’usage de l’astrolabe pour les observations d’astronomie et du monocorde pour l’enseignement de la musique, “science des nombres”, qui bénéficie aussi de l’arrivée en Bavière du Micrologusde Guy d’Arezzo (Munich, Clm 14523, en partie de la main d’Otloh). Il semble qu’en arrière plan des traités de musique se décèle une certaine influence du Timéeque Thierry Lesieur reconnait sans insister (p. 87), influence directe par les six copies du dialogue de Platon présentes en Bavière et par le diagramme IX du Commentaire de Calcidius, repris dans la Scolica enchiriadis; influence indirecte dans la théorie des médiétés. L’ouvrage s’achève par une abondante bibliographie, dix-huit illustrations, quatre index, soit un ensemble de moyens qui permettront aux lecteurs d’accéder à la précieuse documentation éparse dans ces pages d’histoire des sciences. [End Page 336]

Michel Huglo
Paris and College Park, Maryland

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