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Reviewed by:
  • Les commissaires de police au XIXe siècle
  • Christian Chevandier
Dominique Kalifa et Pierre Karila-Cohen (sous la direction de). – Les commissaires de police au XIXe siècle. Paris, Publications de la Sorbonne, 2008, 285 pages.

Un des principaux rouages de l’État qu’ils représentent sur le terrain, là où ne va pas le préfet, figure sociale de premier plan avant d’être objet de fiction, les commissaires de police n’ont jusqu’à ces dernières années suscité d’intérêt chez les chercheurs que parmi les juristes. Les travaux des sociologues Dominique Monjardet sur les policiers et Frédéric Ocqueteau pour le corps des commissaires, mais aussi, en dépit d’une défiance toute professionnelle, les velléités de l’institution elle-même, ont initié une dynamique dans laquelle les historiens trouvent toute leur place, comme en témoigne cet ouvrage, dirigé par Dominique Kalifa et Pierre Karila-Cohen, auquel ont contribué une douzaine d’auteurs. Au lendemain du coup d’État de Brumaire, la loi du 28 pluviôse an VIII refonde l’institution policière mise à mal par dix ans de Révolution et donne au commissaire de police une fonction précise et durable. Certes, le titre date de la fin du xviie siècle et l’on peut trouver dès le xiiie des commissaires du Châtelet dont la fonction ne s’épanouit véritablement qu’avec la création en 1667 de la Lieutenance générale de police, forme initiale de la Préfecture de police de Paris instituée par la même loi de pluviôse. Définis comme « magistrats de l’ordre administratif et judiciaire » par un arrêt solennel de la Cour de cassation de mars 1838, ces hommes devaient maintenir un équilibre parfois incertain entre la politique locale de maires qui recrutaient et employaient leurs subordonnés (sauf à Paris, où la Préfecture de police dépend du ministre de l’Intérieur) et le pouvoir central qui les nommait et gérait leurs carrières tout en laissant les municipalités les rémunérer. Ils devaient prendre également en compte les procureurs dans la mesure où, dans le domaine judiciaire, leur action dépendait du parquet.

En cinq parties, « Profils », « Professions », « Itinéraires », « Élargissements » et « Documents » (les textes législatifs et réglementaires, des témoignages et corres-pondances [End Page 125] et un corpus prosopographique des commissaires parisiens de la loi de l’an VIII jusqu’aux lendemains du Premier Empire), l’ouvrage permet de débrouiller un peu l’identité de cet « homme de l’entre-deux ». Plus divers, par leurs origines et leurs pratiques, que l’on ne pourrait le croire, ces commissaires ont pour certains commencé leur carrière au bas de l’échelle et, jusqu’à ces dernières décennies, il était encore possible de croiser des commissaires qui avaient débuté comme gardiens de la paix. Simenon ne s’y trompa pas qui fit recruter le jeune Jules Maigret comme agent cycliste pour lui faire achever sa carrière commissaire divisionnaire au Quai des Orfèvres.

Les écrits des policiers, particulièrement des commissaires, sont communément des sources de choix pour la plupart des historiens, qui n’en peinent pas moins à s’y reconnaître entre les différentes attributions de leurs auteurs ; spéciaux, centraux, les carrières et prérogatives des commissaires progressent en des modalités qui changent souvent, trop souvent. L’ouvrage fait le point sur ces évolutions et permet de s’y retrouver quelque peu. Ces fameux commissaires spéciaux de la police des chemins de fer, dont les papiers sont précieux pour la connaissance des oppositions politiques, mis en place dans les premières années du Second Empire et conservés par la Troisième République, dont la dimension ferroviaire marque à quel point le régime impérial a su mettre à profit la technologie pour la répression politique, nous sont ainsi mieux connus et les historiens peuvent avec plus de pertinence utiliser les sources qui leur sont ainsi livrées. Les archives publiques...

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