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Reviewed by:
  • Doing Medicine Together. Germany and Russia Between the Wars
  • Gregory Dufaud
Susan Gross Solomon (edited by). – Doing Medicine Together. Germany and Russia Between the Wars. Toronto, University of Toronto Press, 2006, 533 pages.

Pour l’essentiel, ce livre est le résultat d’un colloque international organisé par Susan Gross Solomon, qui s’est tenu en 2000 à l’université de Toronto. À l’exception de deux chapitres spécialement rédigés pour le volume, les textes réunis en sont les actes publiés : au total, une introduction et onze chapitres qui traitent des relations médicales entre l’Allemagne et la Russie au cours de la période dite de Rapallo (1922–1933), ouverte par la signature d’accords initiant le rapprochement de ces deux pays au ban de la communauté internationale. En effet, profitant de cette alliance, les deux communautés médicales utilisent leurs liens anciens pour multiplier les échanges et développer des projets conjoints. L’une des plus belles réussites en est certainement, en 1928, la fondation de l’Institut de la recherche sur le cerveau à Moscou, sur le modèle de l’Institut berlinois du même nom, tous deux placés sous la houlette du neuroanatomiste Oscar Vogt. L’ouvrage renouvelle les démarches adoptées par les historiographies allemande et russe qui, en privilégiant un point de vue par le haut, ont négligé l’analyse du rôle des scientifiques, de leur rattachement institutionnel, de leurs réseaux personnels et des contacts disciplinaires. Aussi cette histoire adopte-t-elle une approche par le bas, à divers égards inspirée par la sociologie des sciences. À travers quatre parties, le récit s’intéresse au choix des partenaires scientifiques (1), aux entrepreneurs scientifiques (2), à la nature des liens médicaux (3) et aux migrations scientifiques (4). Pour comprendre comment la coopération a pu se nouer et fonctionner, les auteurs croisent des sources russes et allemandes, des archives mais aussi des documents imprimés.

La structure du livre permet d’offrir un large panorama des relations médicales germano-soviétiques qui, d’après les articles de Paul Weindling sur l’ouverture de l’Allemagne à la Russie, de Marina Sorokina sur les commémorations du 200e anniversaire de l’Académie des sciences et de Michael David-Fox sur la diplomatie culturelle, n’allaient pas de soi. Elles ont été le résultat de choix, pas toujours faciles, faits de part et d’autre au nom d’intérêts bien compris. Les textes d’Elizabeth Hachten, de Wolfgang Eckart, de Susan Gross Solomon et de Sabine Schleiermacher s’intéressent à la figure intrigante de Heinz Zeiss, un bactériologiste allemand qui, arrivé en Russie en 1921, y est resté jusqu’en 1932. Pendant cette décennie, ce nationaliste, tenant de l’idée d’« espace vital », est parvenu à mettre en œuvre plusieurs projets successifs, aidés par les autorités soviétiques dont il était parvenu à se gagner le soutien. Son activisme a alors permis de sauver des milliers de vies. Les articles de Jochen Richter et de Nikolaï Krementsov qui portent respectivement sur l’Institut de la recherche sur le cerveau et le VIIe Congrès international de génétique, dont la tenue prévue à Moscou en août 1937 a été annulée, montrent, quant à eux, que les relations [End Page 115] médicales germano-soviétiques brouillaient le rapport entre enjeux national et international, tel qu’il est généralement admis par l’historiographie. À travers le parcours du neuroanatomiste Louis Jacobsohn-Lask puis d’un groupe de médecins juifs, les articles d’Ulrike Eisenberg et de Carola Tischler font enfin le récit de l’émigration allemande en URSS après l’arrivée de Hitler au pouvoir, en 1933. Triste ironie, une partie de ces émigrés a ensuite été victime de la répression stalinienne.

Au-delà des quatre grands axes qui organisent l’ouvrage, d’autres thèmes se font écho d’un texte à l’autre : l’entrecoupement en Union soviétique des politiques sanitaire et nationale, la concurrence à l’échelle de l’Europe des communaut...

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