Les instituteurs des Deux-Sèvres du début du XXe siècle (review)

Issu d’une thèse de doctorat d’histoire, l’exercice monographique proposé ici – étudier le corps des instituteurs et institutrices durant l’entre-deux-guerres dans un département rural – est désormais un classique de l’histoire de l’enseignement. Pour ce faire, l’auteure utilise essentiellement les sources académiques (1925 dossiers individuels du personnel enseignant, rapports divers sur la situation scolaire), mais également des revues corporatives et des entretiens auprès d’enseignant-e-s.

Après avoir brossé à grands traits le cadre d’une France en reconstruction qui place l’enfant au cœur de ses nouvelles préoccupations sociales et fait de l’école primaire, alors en pleine maturité pédagogique et professionnelle, le porte-drapeau des valeurs républicaines, l’auteure appréhende les instituteurs et les institutrices par leurs origines sociales et géographiques, leur formation à l’École normale ainsi que leur carrière. Les liens entre l’État et le corps enseignant sont ensuite décrits, en termes de contrôle du corps via l’arsenal des salaires, des règles de l’avancement, des récompenses et des sanctions. Enfin, l’auteure s’attache à replacer l’enseignant-e au cœur de la société, en évaluant d’une part l’impact des pédagogies nouvelles sur les pratiques enseignantes quotidiennes et d’autre part leur engagement syndical et mutualiste dans la défense de leurs intérêts face aux familles, aux maires et à l’État. Malgré un questionnement historique peu affirmé, l’ouvrage a le mérite de revenir sur une époque mal connue de l’histoire de l’école républicaine et de souligner les progrès réalisés (amélioration de la condition enseignante, introduction, certes timide, de la méthode Freinet) comme les retards pris sur la modernité (persistance de l’absentéisme à l’école, éradication trop lente des taudis scolaires faute de moyens suffisants, desserrement encore faible du contrôle social et politique des enseignante-s en milieu rural).