In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • Les Discours de la sympathie: Enquête sur une notion de l’âge classique à la modernité
  • Mitia Rioux-Beaulne (bio)
Thierry Belleguic, Éric Van der Schueren, Sabrina Vervacke, éds. Les Discours de la sympathie: Enquête sur une notion de l’âge classique à la modernité. Québec: Les Presses de l’Université Laval, 2007. 524pp. ISBN 978-2-7637-8486-1.

Avec ce livre, annonce l’introduction, « la sympathie [aurait] désormais sa somme » (xiii). Mais une somme, en quelque sorte, plus programmatique que totalisatrice, puisqu’on y trouverait une « mise en chantier de la notion » (xiii) qui rende possible une « perspective critique » (xiii) [End Page 142] à son égard, et ce, avant même d’en avoir complété—mais cela est-il seulement possible?—l’analyse, que ce soit comme objet de l’histoire des idées, c’est-à-dire comme notion régulant de manière thématique ou structurelle les discours d’une période donnée, ou comme phénomène, soumis à la réflexion des philosophes, psychologues, écrivains, etc. De fait, le livre donne, par les 24 études qui le composent, une idée de l’ampleur du chantier: la notion de sympathie, aux xviie et xviiie siècles, remplit des fonctions si diverses, apparaît dans des registres discursifs si variés, qu’elle semble, en fait, impossible à circonscrire; mais, en même temps, le travail d’édition soigné, le patient et attentif travail de réécriture auquel les auteurs semblent s’être soumis au cours des huit années qui ont séparé la tenue du colloque dont ce livre se veut les actes et sa parution, l’introduction et la postface signées par Jean-Pierre Cléro parviennent à produire un effet de cohérence qui dépasse le simple constat d’une irréductible polysémie.

Il vaudrait mieux tenir cette polysémie comme un point de départ, une condition nécessaire de l’intérêt que la notion suscite: univoque, elle serait imperméable aux déplacements de sens. Le livre, comme le remarque Cléro dans son introduction, permet de prendre la mesure de ces déplacements en suivant cinq perspectives. Dans un premier temps, il parvient à rendre compte de son caractère diachronique: la sympathie a des valences plus cosmologiques ou psychologiques selon les époques, ce qui assure, du même coup, les effets de métaphorisation auxquels elle donne lieu. Mais il permet aussi de voir à l’œuvre le « faisceau d’antinomies » (xxii) que le terme recouvre: primauté de sa signification physique ou psychologique, ouverture réelle à l’autre ou construction imaginaire, fondation dans un ordre transcendant ou véritable structure intersubjective, immédiateté de son opération ou instance supposant médiation, etc. À cela s’ajoute l’insertion de la sympathie dans l’ordre fictionnel qui vient bousculer sa description en termes de normativité. Par son inscription dans le champ de la dynamique affective, elle induit un système de communication des passions axiologiquement neutre. De là, on passe aisément à ce qui, dans la notion de sympathie, est propre à brouiller les cartes sur le plan politique et religieux, à savoir son inscription dans le champ du pathologique qui régit la critique de l’enthousiasme et de la religion, mais qui en fait aussi la clé de la fraternité supposée coordonner la possibilité d’un ordre politique transcendant la seule logique de l’intérêt. Enfin, parce que la notion de sympathie est à la fois un terme d’usage courant et un philosophème, elle donne lieu à des prises diverses et demande à être éclairée de manière interdisciplinaire, exigence que remplit ce livre.

Mais si l’introduction de Jean-Pierre Cléro peut ainsi éclairer la lecture de ces études très diversifiées—si bien, d’ailleurs, qu’on se demande si cette mise en forme résultant d’un après-coup n’était pas indispensable à l’appréciation de l’ensemble—, les éditeurs ont adopté [End Page 143] pour leur part une répartition des contributions en quatre parties qui fournit un autre type d’éclairage sur la notion. C’est-à-dire en les...

pdf

Share