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Reviewed by:
  • Lobbyistes et lobbying de l'Union européenne. Trajectoires, formations et pratiques des représentants d'intérêts
  • Paul Lagneau-Ymonet
Hélène Michel (sous la direction de). –Lobbyistes et lobbying de l'Union européenne. Trajectoires, formations et pratiques des représentants d'intérêts. Strasbourg, Presses Universitaires de Strasbourg, 2005, 352 pages. « Sociologie politique européenne ».

Le projet commun des douze contributions rassemblées dans cet ouvrage collectif est l'analyse de pratiques de représentation d'intérêts particuliers auprès des institutions européennes, en tenant compte des propriétés sociales des agents, de leurs ressources matérielles et symboliques, ainsi que de leurs conditions différenciées d'accès aux institutions et personnes à influencer. L'ouvrage, dirigé et introduit par Hélène Michel14 qui fournit des éléments récents de bibliographie, est composé de deux parties. La première réunit six contributions qui font la genèse d'institutions de représentations d'intérêts particuliers auprès des institutions communautaires, ou qui retracent les trajectoires de certains de ces porteurs d'intérêts, les pratiques qu'ils engagent et les ressources qu'ils acquièrent et mobilisent dans ces activités. La seconde partie comprend six autres monographies qui sont autant d'études de cas dont la diversité, dans les objets étudiés comme dans les approches déployées pour les analyser, permet de varier les perspectives.

En définissant a minima le lobbying comme la représentation d'intérêts particuliers, notamment par le biais de l'expertise légitimante (cf. la conclusion de Michel Offerlé, p. 331), les auteurs donnent à voir non seulement des praticiens divers, mais aussi les effets de ces pratiques sur des espaces, des institutions, des groupes et des agents qui ne sont pas communément associés au lobbying (compris alors comme les pratiques d'influence des agents économiques dominants, par l'intermédiaire de structures ad hoc ou de praticiens mercenaires). Par leurs positions à cheval entre le champ du pouvoir communautaire au sein duquel ils luttent pour le pouvoir sur les institutions et les champs de référence des groupes qu'ils représentent, les praticiens de la représentation d'intérêts apparaissent ainsi collectivement comme des passeurs-prescripteurs, sous tensions, des formes et pratiques de la « gouvernementalité [End Page 171] » communautaire, formellement « rationnelle-légale », fondée sur le recours à l'expertise et la promotion d'une politique de dépolitisation.

Les contributions consacrées au syndicalisme (Anne-Catherine Wagner, Benoît Verier, Sophie Béroud) et aux associations (Aude Cavaillé, Éric Poinsot, Maxime Forest) révèlent les tensions internes à ces organisations, quand il s'agit d'investir la scène communautaire. De plus, ces contributions, notamment celles qui portent sur le syndicalisme, pointent les enjeux politiques qu'implique l'adoption de formes dépolitisées d'expertise pour promouvoir ou défendre des intérêts dominés auprès d'institutions européennes dont l'horizon politique est borné par leur orthodoxie économique. Cette orientation, contradictoire avec la figure légitime du militant, oblige surtout à s'interroger sur les conditions de perpétuation d'univers où prévaut l'intérêt au désintéressement, plutôt que l'intérêt déconnecté de la cause défendue mais tributaire et par-là même intéressé à son succès (du moins le temps de l'investissement professionnel dans sa défense)15. A contrario, le cas développé par Sophie Béroud montre comment la Fédération européenne des travailleurs des transports a articulé sa capacité éprouvée de mobilisation transnationale avec des pratiques contractuelles, dans un contexte marqué par la volonté politique de la Commission européenne de transformer les réglementations des métiers du rail, dans un sens défavorable aux employés roulants du secteur 16.

Les tensions, qui recoupent en outre des différences de trajectoires sociales, nationalement ou internationalement situées, entre les détenteurs d'un « capital militant » mâtiné d'autodidaxie et les détenteurs, souvent plus jeunes, de titres scolaires...

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