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Albert Camus et les formes brèves: de la critique littéraire à l'essai lyrique Maria Teresa Puleio Constater l'absurdité de la vie ne peut être une fin, mais seulement un commencement. Albert Camus, «La Nausée de Jean-Paul Sartre» Ces déments obstinés, accrochés à des planches, jetés sur la crinière des océans immenses à la poursuite d'îles en dérive, qui, chérissant la solitude et la mer, s'empêchera jamais de les aimer? Albert Camus, «La Mer au plus près» Dans le bref jour qui lui est donné, il réchauffe et illumine, sans dévier de sa course mortelle. Semé par le vent, moissonné par le vent, graine éphémère et cependant soleil créateur, tel est l'homme, à travers les siècles, fier de vivre un seul instant. Albert Camus, «À René Char» V A L'INTÉRIEUR DE L'INTENSE ACTIVITÉ de journaliste d'Albert Camus, commencée très tôt, les articles qu'il dédie à la critique litt éraire méritent une analyse à part. Il est encore jeune lorsqu'il inaugure dans Alger républicain^, auquel il collabore comme rédacteur, le Salon de lecture et ses chroniques littéraires; il ne cessera de poursuivre cette activit é, ce qui témoigne de l'intérêt qu'il lui attribue. Ces textes qui jalonnent toute sa vie paraissent parfois en même temps que les grands chefs-d'œuvre, nous renseignant sur le mouvement et sur l'évolution de sa pensée dans les moments où il élabore ses principes esthétiques. Cette partie de la production camusienne se révèle singulièrement importante , non seulement parce qu'elle nous permet de pénétrer d'une façon plus directe dans l'univers intérieur de l'auteur, de saisir en quelque sorte les «métaphores obsédantes» à travers lesquelles percent ses «mythes personnels »2, mais aussi parce qu'on y retrouve les thèmes dominants de sa production majeure, qu'il ne cesse de développer. Plusieurs mots-clés qui constituent autant d'isotopies, plusieurs mythes 'racontés' en filigrane dans les pièces et dans les adaptations théâtrales, dans les récits et dans les essais lyriques, se trouvent dès le début dans ses articles ou essais critiques, témoignant de la longue fidélité de l'écrivain à son univers intérieur, à sa conception de la vie et de l'existence, à l'idée de la création artistique et de la fonction de l'art qu'il a mûrie depuis sa jeunesse. Dans ses œuvres les plus connues, Camus continue d'appliquer le principe qu'il a appris en lisant Gide quand il était encore très jeune, et que, au début Vol. XLIV, No. 4 25 L'Esprit Créateur de sa carrière d'écrivain, il cherchait sa voie: «Gide a trop cherché à s'éloigner de Gide. C'est l'aspect de Gide que j'ai immédiatement compris. Mais n'estce pas parce que je cherche à m'éloigner de moi?»3 Par contre, dans ses articles l'écrivain ne s'éloigne pas trop de lui-même; son «je» n'étant pas filtré par la voix du narrateur, ni par le exigences du metteur en scène, sa pensée se révèle d'une façon plus directe. Nous ne pourrons certainement pas prendre en considération tous les articles de critique littéraire parus dans de différentes revues, depuis Sud, à Alger républicain, au Soir républicain, jusqu'à Preuves, ni toutes les préfaces, les avant-propos, les prière d'insérer et les autres textes brefs qui constituent le corpus de sa production de critique. Quelques-uns suffiront cependant à démontrer qu'il s'y est sans aucun doute montré et livré davantage par rapport aux récits, aux romans, aux pièces, en particulier ceux sur Sartre, qu'il admire beaucoup tout en ne partageant pas ses goûts ni ses choix, sur Melville, qu'il considère un de ses modèles artistiques, sur Gide et Grenier, ses 'maîtres'. C...

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