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L'autonomie intermediale du littéraire: Une introduction Jean-Christophe Valtat ON SAIT LE POIDS QUE PÈSE EN FRANCE la tradition critique de l'autonomie du littéraire. Si elle a ses mérites théoriques, elle est aussi un des piliers sur lesquels reposent un certain repli des études littéraires vis-à -vis de leur environnement contemporain. Ce repli n'est pas tant un refus des nouveaux média en eux-mêmes, adoptés avec un enthousiasme souvent touchant, qu'une réticence, plus ou moins consciente, à tirer les conséquences théoriques de ces nouveaux outils, tant sur le plan de la production «scientifique», que sur le plan de l'objet littéraire même. Il paraît pourtant évident que la place—et la nature—de la littérature se modifient selon la galaxie médiatique dont elle est partie prenante, et que ces modifications nous conduisent à percevoir rétrospectivement qu'elles ont elles-mêmes une histoire, liée aux mutations technologiques passées. Et notamment que l'idée même d'une autonomie du littéraire a elle aussi une histoire, qui n'est autre que celle précisément de la réaction de la littérature à de nouveaux contextes , dans lesquels elle découvre ou construit sa spécificité à travers et grâce à la contestation et la concurrence entre les média. D'un point de vue litt éraire, il ne saurait y avoir «d'autonomie» que selon les mouvements historiques de la convergence et de l'hybridation, selon aussi un jeu complexe d'influences déniées et d'alliances stratégiques: bref, l'autonomie supposée du littéraire n'est que l'autre face de l'intermédialité propre à tout contexte médiatique et, l'opposition des théories de l'autonomie à celles de l'implication dans le «concert medial» ne renvoie qu'à l'unité d'un questionnement sur précisément, cette intermédialité défait. Encore faut-il s'entendre, pour le comprendre, sur ce que signifie le terme d'intermédialité, ou plutôt faut-il faire ressortir ce en quoi c'est une ambiguïté fondamentale qui le rend si fécond. Il a sa source dans la notion d'intermedium , proposée par l'artiste Fluxus Richard Higgins en 1966. A partir d'une remarque sur le contexte contemporain comme brouillant les distinctions sociales et, au-delà , les formes traditionnelles de la réception esthétique, notamment la séparation entre spectateurs et acteurs au théâtre, il propose sous la forme du happening, non seulement l'abolition de cette distinction mais aussi l'abolition entre les différents média artistiques: collage pictural, musique, théâtre et danse. Cette origine esthétique de la notion, qui a elleVOL . XLIII, No. 2 3 L'Esprit Créateur même une histoire sur laquelle je reviendrai, présente une équivoque fondamentale , mais aussi symptômatique: elle ne parle que d'une forme «interesth étique», qui fait appel aux catégories traditionnelles des arts, mais elle la tire d'un contexte technologico-médiatique qui met l'accent sur la communication et les transports: We need more portability and flexibility, and this the traditional theater cannot provide. It was made for Versailles and for the Sedentary Milords, not for motorized life-demons who travel six hundred miles a week. Versailles no longer speaks very loudly to us, since we think at eighty-five miles an hour. Cet intermedium n'est donc «medial» qu'au sens où la nouvelle galaxie médiatique, considérée simplement dans ses effets, détermine à son tour la relation de communication dans les arts, et à partir de là la relation entre les arts entre eux. Cette généalogie du terme porte en elle les caractéristiques de ce qui sera à partir des années 80 le discours émergent de «Γ intermédialité» dans le contexte universitaire, et que l'on peut caractériser par deux traits principaux: d'une part le maintien d'une forte composante «interesthétique» (dans les études entre cinéma et littérature, littérature et bande dessinée, tout ce qui concerne le rapport...

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