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<Nineteenth Century French Studies 30.1&2 (2001) 186-189



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Book Review

Barrès romancier:
une nosographie de la décadence


Wittmann, Jean-Michel. Barrès romancier: une nosographie de la décadence. Paris: Champion, 2000. Pp. 219. ISBN: 2-7453-0190-X

En mars 1942, c'est avec amertume que Jean Cocteau déplorait dans les pages de son journal le fait que Maurice Barrès se trouvât au purgatoire des lettres. Non seulement [End Page 186] Cocteau regrettait-il que l'on ne lût plus les œuvres du romancier mais encore pestait-il contre le fait qu'aux Déracinés et à La Colline, le public préférât les œuvres de son ennemi de toujours: André Gide. "Il est incroyable, écrit Cocteau, que Gide l'emporte sur de tels chefs-d'œuvre que la jeunesse idiote refuse de lire." Il va sans dire que le jugement féroce émis contre Gide par Cocteau, et dans le même élan l'inclination manifestée à l'égard des œuvres de Barrès, est lourd d'arrière-pensées. A travers l'exemple de Barrès, c'est avant tout sur son propre sort d'écrivain malmené par la critique, et notamment par la Nouvelle Revue Française fondée par Gide, que Cocteau se lamentait. En pleine guerre et alors même qu'il a fui la France pour se réfugier en Afrique du nord, Gide incarnait encore pour les critiques et les lecteurs de 1942 le "contemporain capital" des lettres françaises, au grand dam de Cocteau qui ne comprenait pas que l'on puisse lui préférer ce vieillard sournois, tel qu'il aime à le dépeindre dans les pages de son journal. On voit combien la question que se pose Jean-Michel Wittmann dans son nouvel essai, à savoir "peut-on encore lire les romans de Barrès aujourd'hui?" est loin d'être nouvelle. Il y a plus de trois quarts de siècle, au moins depuis le procès qu'intentèrent jadis au romancier André Breton et ses acolytes, que la question ne cesse d'être posée. Et les attaques de Cocteau contre Gide au profit de l'auteur de Colette Baudoche, il y a exactement cinquante ans, semblent avoir produit l'effet inverse que celui qui était escompté. Le fait est qu'on ne lit pas plus Barrès aujourd'hui qu'on ne le lisait en 1942. On suppose que Jean-Michel Wittmann, auteur d'un précédent essai sur les œuvres "fin de siècle" de Gide, n'était pas sans savoir le défi qui l'attendait cette fois-ci dans cette étude des œuvres "nationalistes" de Maurice Barrès, textes que le critique n'a aucun mal à qualifier lui-même de "sèchement didactiques." Mais loin de se limiter au fait qu'il s'agissait de parler de livres que l'on ne lit plus guère, le défi que se devait de relever Jean-Michel Wittmann dans son propre livre était aussi le suivant. En ces temps de conformisme intellectuel et moral, où la pensée objective et originale semble le plus souvent devoir céder au "politiquement correct," le simple fait de revendiquer son appartenance à une culture en voie de disparition ou encore d'exprimer sa nostalgie d'un monde révolu passe pour la plus réactionnaire des attitudes et, pour le coup, devient même passible de la censure. On l'a vu l'année dernière, en France aussi bien qu'aux Etats-Unis, au moment de la publication de La Campagne de France de Renaud Camus vilipendé par les journalistes de tous bords au point que l'éditeur de La Campagne de France se vit contraint de retirer l'ouvrage des librairies sans autre forme de procès. On n'avait pas vu cela depuis Madame Bovary et Les Fleurs du mal. Dans un tel climat de suspicion et de haine, le défi de Wittmann était donc courageux, et il...

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