In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Reviewed by:
  • Le Pathétique dans le théâtre de Robert Garnier
  • Charles Mazouer
Le Pathétique dans le théâtre de Robert Garnier. By Florence Dobby-Poirson. (Bibliothèque littéraire de la Renaissance, LXVI). Paris, Champion, 2006. 662 pp.

Malgré une conclusion un peu laborieuse, ce gros ouvrage, issu d'une thèse, se recommande par son aisance, sa clarté et sa netteté. Pour présenter la notion centrale chez Garnier du pathétique, que l'auteur distingue du sentiment tragique (mais les deux concepts se recoupent partiellement), elle consacre un fort chapitre au recours à l'émotion depuis l'Antiquité, à commencer par l'usage qu'en prô naient les orateurs; pétris de rhétorique antique, mais aussi influencés par l'Italie, nos théoriciens et nos dramaturges du XVIe siècle donnent une place centrale à l'émotion, au movere, l'édification, le docere, qui est de définition dans la tragédie, finissant par devenir accessoire. Jean de La Taille, le premier, sous l'influence d'Aristote, fit du pathétique le but et le principe de plaisir de la tragédie (chap. I). Il sera suivi par Garnier qui, par le choix des sujets, par sa dramaturgie et sa poétique, cherche dans son théâtre à créer et à diffuser l'émotion. Elle est d'abord créée par des sujets lamentables, l'enchaî nement de malheurs et d'événements funestes à des familles et à des peuples (chap. II). La dramaturgie, ensuite [End Page 74] (chap. III), contribue puissamment à l'instauration du pathétique — mise en place d'une atmosphère de crainte, situations propres à inspirer la pitié, resserrement du temps, choix des scènes, occupation de l'espace, typologie des personnages et des dé nouements; tout est subordonné à l'objectif prépondérant: 'rendre sensible au public les émotions éprouvées par les personnages et provoquer, de ce fait, la crainte, l'admiration ou la pitié' (223). Assez banalement fondé sur les catégories classiques de la dramaturgie de Jacques Scherer et faisant parfois appel à des études assez anciennes, ce chapitre se présenterait comme une étude générale de la dramaturgie de Garnier, avec ce mérite de rectifier à bon droit des jugements admis sur le théâtre de Garnier. Toujours en se servant de Scherer, le développement suivant (chap. IV) représente une bonne étude technique du dialogue, conçu et écrit pour accroître l'émotion. On appréciera particulièrement l'étape qui vient ensuite, consacrée à l'expression pathétique (chap. V) — expression des passions dans le discours, bien entendu; mais aussi place prépondérante du corps, qui est à la fois montré et décrit par des mots. Tyrans et victimes ont leur langage, envisagé, de manière mêlé, dans leur thématique, leurs images et leur stylistique. Les récits sont également un haut lieu de l'expression du pathétique. L'étude finale de ce que l'auteur appelle la diffusion dans le public de l'émotion (chap. VI) concerne les relations du pathétique avec le didactisme, avec les idées morales et religieuses de Garnier, pour déboucher sur la question de la catharsis — selon la démarche d'Aristote, elle s'effectue chez Garnier par la transformation esthétique, dans les formes du pitoyable et de l'effrayant, des sentiments bruts (608). La bibliographie, qui inverse curieusement les textes et les études, n'est pas exhaustive, même par rapport aux références données dans le corps de l'ouvrage. Fortement appuyé sur Aristote et la tradition rhétorique, nourri de la lecture des théoriciens de l'Antiquité et de la Renaissance, ce livre solide est plus une étude de la poétique de Garnier que de sa pensée, bien que touchant, à travers l'analyse du pathétique, à la plupart des questions qui concernent son théâtre. [End Page 75]

...

pdf

Share