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  • Deux lettres inédites de Crébillon fils; à M.M. de La Place et de La Garde du Mercure de France et à Malesherbes
  • Sarah Benharrech (bio)

Deux lettres de Claude Prosper Jolyot de Crébillon dit Crébillon fils ont été retrouvées depuis la publication de la « Correspondance » dans le tome 4 des Œuvres complètes éditées sous la direction de Jean Sgard.1 La première lettre, dont on ne connaît aucune version manuscrite, avait paru dans le Mercure de France du vivant de Crébillon tandis que la seconde a été partiellement publiée dans un catalogue de vente d'autographes. Nous voudrions remettre ces deux lettres dans le contexte de leur rédaction et plus largement les situer dans l'ensemble des lettres déjà publiées de Claude Crébillon. Ces deux lettres permettent d'établir avec plus d'exactitude le parcours biographique de notre auteur, en particulier les rapports qu'il entretint avec son père et la réputation de ce dernier, et de documenter ses tentatives de s'assurer des rentes en exerçant les fonctions de censeur.

La première lettre datée du 15 novembre 1762 que nous reproduisons intégralement ci-dessous, publiée dans le Mercure de France en décembre de la même année, prend place dans la série des lettres déjà connues qu'échangèrent le marquis de Marigny et Crébillon à [End Page 401] propos du mausolée dédié à la mémoire de Crébillon père. Cette même lettre sera publiée de nouveau plus tard, mais sans précision de date, dans l'« Éloge de Crébillon » composé par d'Alembert pour preuve de la faveur royale dont bénéficiaient les Crébillon à l'époque de la disparition du père. Une seconde lettre autographe signée portant la date du 21 septembre 1774 témoigne des manœuvres du fils pour succéder à son père aux fonctions de censeur de la police dont il espérait alors avoir la survivance officieuse. Dans une lettre de remerciement très probablement adressée à Malesherbes, Claude Crébillon y montre l'habileté et le style virtuose qu'on lui connaît aussi bien dans ses œuvres que dans son commerce épistolaire.

Prosper Jolyot de Crébillon décède le 17 juin 1762 âgé de 88 ans. Alors que l'Académie française fait aussitôt donner une messe aux Cordeliers, les Comédiens français qui ne veulent pas être en reste, font célébrer en grande pompe dans l'église de Saint-Jean de Latran un service solennel le mardi 6 juillet avec, dit-on, le consentement du prince de Conti, et y distribuent des billets pour une représentation exceptionnelle le soir même de la tragédie Rhadamiste . En l'honneur du défunt académicien, les directeurs de l'Opéra envoient plusieurs de leurs musiciens, une centaine selon le compte rendu du Mercure . Charles Collé rapporte qu'il « y eût grande et belle musique; et [que] l'on exécuta la messe de M. Gilles, célèbre compositeur de musique d'Église ».2 Le Théâtre-français, les auteurs et agents des spectacles de Paris saisissent l'occasion pour honorer non seulement un illustre membre de leur profession mais surtout l'ensemble du corps de métier. Toutefois Mgr de Beaumont, archevêque de Paris, s'émeut de ce service célébré en l'honneur d'un homme de théâtre, alerte le Roi et les Chevaliers de Malte, propriétaires de l'église de Saint-Jean de Latran, qui condamneront le prêtre à six mois de séminaire.3

Quelques mois plus tard, en août de la même année, les gens du métier rivalisent d'effort pour pérenniser la gloire de leur illustre collègue. Favart aurait pris l'initiative de lancer une souscription pour élever un monument à la gloire de Crébillon mais faute de soutien, l'affaire reste sans suite. Enfin le 28 octobre 1762, Crébillon reçoit du marquis de Marigny une premi...

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