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Reviewed by:
  • Le malentendu: dire, mésentendre, mésinterpréter
  • Céline Beaudet (bio)
Laforest, Marty, Le malentendu: dire, mésentendre, mésinterpréter, s. la dir. de Marty Laforest Québec, Éditions Nota bene, 2003, 210 p., 22,95$

Ce collectif, sous la direction de la professeure Marty Laforest, est le résultat d'un colloque tenu en 2000 sur le même sujet. D'entrée de jeu, Laforest, pose le problème du sens et de sa reconstruction, « processus en partie observable : les interlocuteurs discutent, révisent, négocient et ce faisant fabriquent le sens ». Le malentendu intéresse les analystes de discours de provenances disciplinaires diverses. Enjeu linguistique, communicationnel et psychologique fondamental pour les uns (Alain Trognon, Véronique Traverso, Martina Drescher, Diane Vincent, Denise Deshaies, Guylaine Martel, Laurent Perrin), il est stratégie argumentative, rhétorique ou enjeu de l'écriture littéraire pour les autres (Robert Dion, Marc André Bernier, Richard Saint-Gelais, Jean Valenti). Quelle que soit sa discipline d'appartenance, le lecteur y gagne à regarder un même [End Page 161] phénomène langagier repris sous des angles différents. Il y a bel et bien « effet-recueil, force d'ensemble », comme le souligne avec justesse Laforest dans son introduction.

Quelques articles ont retenu davantage mon attention. Traverso s'intéresse au malentendu dans une perspective interactionnelle, appliquée à des conversations familières. Elle part d'une définition énoncée par Renata Galatolo et Marina Mizzau (dans « Conflit conversationnel et malentendu : quelques relations possibles », La linguistique, vol. 34, no 1, 1998) : « On définit le malentendu comme une divergence interprétative entre au moins deux interlocuteurs, dont au moins un n'est pas immédiatement conscient ». Elle s'exerce ensuite à nommer des repères théoriques pour la description d'un malentendu, dans une perspective interactionnelle. La grille théorique proposée, couvrant à la fois la décomposition de l'origine du malentendu et de son traitement en conversation sera fortement appréciée dans un contexte pédagogique.

Renata Galatolo discute du statut du malentendu dans un contexte communicatif conflictuel, en particulier où il y a asymétrie dans le niveau de compétence linguistique et communicative des interlocuteurs. C'est le cas d'un talk-show, « un contexte où l'éthos communicatif n'est pas coopératif mais conflictuel ». L'auteure remarque que « malentendu et conflit sont étroitement liés, le malentendu contribuant à faire surgir et à maintenir la conflictualité. Les malentendus nourrissent le conflit et c'est justement cette fonction du malentendu qui fait soupçonner que les sujets puissent les provoquer ». Dans de telles situations, il devient parfois difficile, pour l'analyste qui observe, de déterminer si le malentendu est accidentel ou délibéré, rappelle l'auteure avec perspicacité. Cela soulève la place du malentendu dans les buts communicatifs de l'échange verbal et son rôle dans le respect ou la perturbation des règles de politesse.

Martina Drescher s'intéresse justement aux conséquences affectives des malentendus dans la conversation. Pour elle, « il semble cependant évident que chaque incompréhension contient en germe un potentiel conflictuel. Le surgissement d'un malentendu comporte des risques pour la face des interactants et il peut causer des moments inconfortables, voire aboutir à une crise interactionnelle ». L'auteure renvoie ensuite le lecteur à la distinction entre unhearing et misunderstanding opérée par Erving Goffman (Forms of Talk, University of Philadelphia Press, 1981), nuance particulièrement éclairante pour la compréhension de ce qu'est ou n'est pas un malentendu.

Alain Trognon pose le problème autrement, voyant dans le malentendu une source de productivité dans les échanges langagiers. S'appuyant sur des exemples conversationnels dénués d'éléments conflictuels, l'auteur démontre que le malentendu est lié à la nature inférentielle de la communication humaine et au caractère flou de la langue, deux facteurs qui engendrent le malentendu et forcent constamment les interlocuteurs à [End Page 162] reformuler, expliquer, développer des séquences latérales de réparation. Trognon cite Edda Weigand (« Misunderstanding : the standard case », Journal of Pragmatics, vol. 31, 1999) : « It is precisely this risk of misunder-standing...

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