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Reviewed by:
  • Tristan Tzara
  • Stephen Steele
Henri Béhar . Tristan Tzara. Paris: Oxus ("Les Étrangers de Paris, Les Roumains de Paris"), 2005. Pp. 257. 18 €.

On a pu lire récemment sur un message de la liste électronique Mélusine (rattachée au Centre de Recherches sur le Surréalisme de Paris III) que le déménagement de la maison d'édition Flammarion allait s'accompagner d'une réduction importante de son stock des Œuvres complètes de Tristan Tzara, question d'espace, question de vente. Ce passage de Tzara au surplus survient un an à peine après le Tristan Tzara d'Henri Béhar, architecte des Œuvres complètes parues entre 1975 et 1991, qui constate dans son ouvrage de 2005: « Inutile de se voiler la face : on ne lit pas Tzara aujourd'hui » (9). De cette mise de côté d'une figure essentielle de l'avant-garde sort une déception pour Henri Béhar, premier et dernier lecteur intime de Tristan Tzara, qui rappelle avoir « longtemps travaillé dans le bureau, plus exactement au bureau de Tristan Tzara [...] peu après sa mort » (5).

Dans le beau prologue à son ouvrage, Béhar partage son expérience de proximité avec un Tzara presque encore présent, avec son lieu de travail et avec les objets d'art réunis dans l'espace de la rue de Lille. Ces objets viennent se distribuer selon deux axes de la réflexion de Tzara sur la production poétique, mouvements d'avant-garde et cultures africaines et océaniennes. Les vers et les sons de l'époque Dada, et sa poésie de la suite sont ramenés, par Tzara dans plusieurs de ses textes sur la poésie, à « la notion », emprunté[e] à Jung, « de penser non dirigé » (117), c'est-à-dire une pensée de type « mobile » (Benda) qui fonctionne dans un état de liberté, que Tzara trouve incarnée dans les œuvres d'art primitif et dans les aventures de rêves qui débutent vraiment à son arrivée à Zurich en 1915. Une de ces aventures atteint Béhar sous la forme d'un « Miroir collage » signé Kurt Schwitters suspendu au mur dans le bureau de Tzara, et qu'il « ne [s]e lassai[t] pas de décomposer » (6).

Béhar déplore l'éclatement progressif de cet espace de travail du poète, où les manuscrits, la correspondance, les tirés à part conservaient on ne peut mieux le parcours de Tzara, ainsi que « toute la mémoire de Dada, une bonne partie de celle du surréalisme et de l'avant-garde du XXe siècle » (7). Si la collection n'a pas pu être gardée intacte, malgré le don des manuscrits et de la correspondance à la Bibliothèque Littéraire Jacques Doucet, et qu'elle a été dispersée dans différentes ventes, c'est à relier pour Béhar à un refus des institutions de valoriser ce tout (livres, objets, revues, papiers et manuscrits) que contenait le bureau de Tzara. Le lecteur de Béhar ne peut qu'être saisi par cette image définitivement révolue du chercheur en situation d'accès libre et privé à l'ensemble de la collection de Tzara. On était plusieurs à avoir le même regret au moment de la vente Breton en 2003, que Béhar rapproche de ce qui s'est produit avec Tzara, et on était encore plus nombreux à courir à une vitesse qui ne s'est pas encore ralentie aujourd'hui vers ces documents et objets, mémoire du surréalisme et de Dada à Paris, longtemps préservés ensemble rue Fontaine mais très peu ouverts aux chercheurs.

L'ouvrage de Béhar reproduit onze lettres reçues par Tzara entre 1916 et 1939 pour documenter ses relations avec l'avant-garde roumaine, Marcel Janco avec lui à Zurich, Ion Vinea son ami de jeunesse en Roumanie, Benjamin Fondane en lecteur de L'Homme approximatif (1931) et des Midis gagnés (1939), et deux appels émanant de la Roumanie dans les années trente, Jacques Costine et Sacha Pana. Ces documents complètent le chapitre consacré aux années roumaines, qui est suivi d...

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