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L'Esprit Créateur 46.1 (2006) 113



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Vallot, Daquin et Fagon. Journal de santé du roi Louis XIV. Édition établie par Stanis Perez. Paris: Jérôme Million, 2004. Pp. 445.

Il existe, dans la « Collection Mémoires du Corps » dirigée par Jean-Jacques Courtine, bon nombre de documents ressuscités dont l'intérêt pour le chercheur moderne est considérable. (Je pense en particulier à la traduction en français du Traité de la mélancolie de Timothy Bright dont l'édition originale date de 1585.) Mais aucun n'est plus important que le Journal de santé de Louis XIV, reproduit ici pour la première fois depuis 1862 et réédité avec attention et intelligence par Stanis Perez. Témoignage précieux de toute une époque, Le Journal nous livre des informations qui intéresseront fortement les historiens de la hiérarchie sociale, du protocole monarchique, de la médecine (dans tous ses aspects répugnants), et de la nutrition même, car on sait que le régime avait sa place, à côté du clysterium donare, dans les remèdes à l'aube des temps modernes.

À certains moments de la lecture du Journal, on croit être tombé sur une scène perdue du Malade imaginaire, tant les médecins tiennent à expliquer les lavements, les pommades et les bouillons purgatifs destinés à contrôler, par exemple, le « flux de ventre du roi, fort opiniâtre, qui approchait de la dysenterie et de la nature du flux mésentérique, lequel dura plus de dix mois » (441).

Tout en fournissant une profusion de détails sur le corps physique du roi, Le Journal ne manque pas d'apporter des précisions sur l'autre corps, symbolique, étudié par Apostolidès après —et d'après—Kantorowitz. D'un bout à l'autre du Journal les médecins restent conscients du fait que le statut de leur patient rehausse le leur et que, dans un sens, l'avenir du pays est entre leur mains. C'est souvent pourquoi ils notent que les devoirs et les cérémonies publiques, si nécessaires au maintien de la grandeur royale, finissent par affaiblir le roi et retarder les guérisons : le corps politique ombrage trop, à leur avis, le corps physique.

En fin de compte, on croyait que le roi était différent, âme et corps, des autres. Mais c'est dans Le Journal que Louis XIV est dépeint comme le simple mortel que des médecins flatteurs soignaient à proximité de leur plume.

University of California, Santa Barbara


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