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Reviewed by:
  • L'Hermès québécois, and: L'Hermès québécois II
  • Claude Grégoire (bio)
Eugène Roberto , L'Hermès québécois Ottawa, Éditions David, coll. Voix savantes, 2002, 155 p., 16$
Eugène Roberto , L'Hermès québécois II Ottawa, Éditions David, coll. Voix savantes, 2002, 263 p., 18$

Portant depuis longtemps les indélébiles stigmates du sédentarisme et du misérabilisme, le roman terroiriste québécois, notamment dans certaines œuvres régionalistes, est parfois l'objet d'études qui en dévoilent des aspects, fortuits ou non, qui tranchent avec la perception communément admise de l'ordre social et littéraire de l'époque. Certains personnages de romans, notamment, sèment de façon insidieuse les germes d'une certaine évolution, à défaut de révolution : des êtres mobiles dans un monde souvent sclérosé, habiles et ingénieux, transformant des destins que l'on croyait fixés. C'est la figure mythologique d'Hermès qu'Eugène Roberto, professeur à la retraite du Département des lettres françaises de l'Université d'Ottawa, vient mettre en lumière dans près d'une dizaine de récits québécois des XIXe et XXe siècles dans les ouvrages L'Hermès québécois et L'Hermès québécois II, parus en 2002.

Dans le premier ouvrage, L'Hermès québécois, Roberto rappelle de prime abord les caractéristiques fondamentales de la figure hermaïque selon les paramètres de la mythologie grecque. Le dieu-caillou est avant tout le premier chemin, l'être qui chemine et évolue et, par là, celui par qui arrivent les métamorphoses : son intelligence et sa ruse transforment les destins. Noyau des transformations, le personnage romanesque constitue en ce sens un lieu d'analyse singulièrement riche pour Roberto et accentue des particularités de l'archétype.

Ainsi Roberto met-il en évidence trois types d'hermès. L'hermès fraudeur dans Le dompteur d'ours d'Yves Thériault (1951) est le faux dompteur d'ours, Hermann, qui se construit un personnage et qui cultive habilement la dérobade. Dans Le Survenant de Germaine Guèvremont (1945), c'est l'hermès glorieux qui se profile dans le personnage principal, par l'éclat de ses actes, l'évidence de ses talents qui transforment le Chenal du Moine, son rayonnement. Moins centrale que dans les deux récits précédents, la figure hermaïque de La terre paternelle, de Patrice Lacombe (1846), consacre l'hermès filial en Charles Chauvin, que Danis, l'ami de la famille Chauvin, avait en quelque sorte inspiré par son passé voyageur. [End Page 574]

Le second ouvrage de Roberto, L'Hermès québécois II, amorce la question hermaïque par l'hermès amoureux avec George Nelson, dans Kamouraska d'Anne Hébert (1970), ce médecin dont les actions cristallisent plus que celles de tout autre personnage la question de vie et de mort dans son univers. Plus serviteur sera, paradoxalement, le nomade Albert, dans Trente arpents de Ringuet (1938), qui agira sur les consciences, à l'instar du Survenant, chez les sédentaires qu'il côtoiera lors de son passage chez les Moisan. À l'opposé, le roman Les engagés du Grand Portage, de Léo-Paul Désrosiers (1938), met en scène un hermès fourbe en Montour, qui, rappelant le dompteur d'ours de Thériault, trompe son entourage, mais de façon plus virulente dans son ascension dans la Compagnie du Nord-Ouest. Pour sa part, Menaud, maître-draveur de Félix-Antoine Savard (1937) montre, après une phase d'ascension, un hermès frustré : la montagne, la mort et les exploitants le plongent dans le délire. François Paradis dans Maria Chapdelaine, de Louis Hémon (1914), représente un hermès jeune, plus nomade et insouciant que Menaud, qui transformera, dans sa vie comme dans sa mort, le destin de Maria. Quant à l'habile père Michel, de Forestiers et voyageurs de Joseph-Charles Taché (1863), il incarne...

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