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French Forum 27.1 (2002) 23-43



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De la Bonne Nouvelle aux nouvelles:
remarques sur la structure de L'Heptaméron

Gérard Defaux


Il est impossible de ranger les pieces, à qui n'a une forme du total en sa teste. A quoy faire la provision des couleurs à qui ne sçait ce qu'il a à peindre?

Montaigne, Essais

Vivre nous fault estantz tousjours en guerre.

Marguerite, Discord estant en l'homme

Comme le suggère clairement le titre de cette étude, ce n'est pas la femme qui, en Marguerite de Navarre, retiendra ici mon attention, mais l'écrivain. 1 Et sans aucun embarras ni remords d'aucune sorte, puisque qu'une étude de la première Journée de L'Heptaméron, récemment publiée dans French Forum, 2 m'a permis d'aboutir à la conclusion que "la guerre des sexes," bien réelle, voire violente, n'est évoquée par la reine dans son recueil que pour y être finalement dénoncée et dépassée; qu'elle ne constitue pas pour elle une fin en soi, un telos, mais au contraire tout juste un point de départ; et que si nous tenons à donner une base solide, une véritable "pierre de touche" à cet ouvrage inachevé, c'est vers l'Evangile et les Psaumes, vers saint Paul, saint Jacques et saint Jean, que nous devons nous tourner, vers l'Ecriture sainte et non pas vers cette guerre, cet "ontological split," ce "discourse on gender" qui, dans sa stérilité et ses apories manifestes, n'est pour elle rien d'autre que la métaphore même de notre condition fragile, imparfaite et pécheresse. Sur cette question, la reine me semble avoir adopté une attitude assez semblable à celle de sa consoeur Christine de Pizan. Elle croit comme elle que ce n'est pas le corps, mais l'âme de la créature qui a été créée à l'image de Dieu. Et l'âme, comme chacun sait, n'a pas de sexe. Et non seulement elle n'a pas de sexe, mais "Dieu la créa aussi bonne, aussi noble, identique dans le corps de la femme comme dans [End Page 23] celui de l'homme." Inutile, par conséquent, de se battre pour savoir qui, de l'homme ou de la femme, doit l'emporter sur l'autre. La plus grande, la meilleure des créatures, sera toujours tout simplement définie en fonction non pas de son sexe, mais de son "mérite": car "l'excellence ou l'infériorité des gens ne réside pas dans leur corps selon le sexe, mais en la perfection de leurs moeurs et vertus." 3 Position d'autant plus digne d'être méditée qu'elle rejoint ce que disait déjà saint Paul dans son épître aux Galates (3: 26-28): depuis la venue de la foi sur cette terre, "il n'y a pas de Juif ni de Grec, il n'y a pas d'esclave ni d'homme libre, il n'y a pas d'homme ni de femme," mais seulement des créatures "toutes unies en Jésus Christ": Omnes enim vos unum estis in Christo Jesu. Certes, tous et toutes créatures pécheresses; mais aussi tous et toutes créatures d'un Dieu dont la miséricorde est infinie. Dans ce domaine, donc, la cause me paraît entendue. Et je ne vois aucune raison de m'y étendre davantage.

Au contraire, dans le domaine des études seiziémistes, l'un des pro-blèmes qui me semble se situer aujourd'hui au premier plan de nos préoccupations, diviser nettement la critique en deux camps—autre "guerre" fratricide—est celui, fondamental, pour ne pas dire élémentaire, de la lecture ou, plutôt, de la perception des oeuvres, je veux dire des a priori idéologiques qui nous guident quand nous approchons celles-ci dans l'espoir d'en rendre compte au mieux. Qu'il s'agisse de Rabelais, de Montaigne ou de...

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